3.5 millions personnes travaillent la nuit en France (métropolitaine). Soit un million de plus en vingt ans.
Il est intéressant de rapprocher cette observation de la tendance parallèle à vouloir rendre la nuit comme le jour, notamment par l'augmentation continue du nombre de points lumineux extérieurs (+64 %) et au quasi doublement de la durée d'éclairement la nuit, dans la même période.
Les travailleurs de nuit représentent désormais 15.4 % des salariés en 2012. Pour le travail de nuit habituel, il s'agit d'"une proportion qui a plus que doublé en vingt ans" rappelle la DARES pour le Ministère du Travail, de l'Emploi et du Dialogue Social. Parmi elles, 21,5 % des hommes et 9,3 % des femmes salariés travaillent la nuit. Les femmes sont désormais un million en 2012, quand elles n'étaient que 500 000 en 1991.
La nuit française à géométrie variable
Nuit = entre 21 heures et 6 heures du matin, selon le code du travail, le travail de nuit recouvre cette plage horaire depuis la loi du 9 mai 2001 (entre 22 heures et 5 heures antérieurement). La loi définit le travailleur de nuit comme celui qui accomplit une fraction de son temps de travail entre 21 heures et 6 heures soit au moins trois heures deux fois par semaine, soit au moins 270 heures sur douze mois consécutifs.
Nuit = de minuit à 5 heures du matin pour les statistiques de l'INSEE : "on considère qu’une personne travaille la nuit quand elle déclare que sa période de travail se situe, même partiellement, dans la tranche de minuit à 5 heures du matin". Cette période est décrite par les physiologistes comme celle durant laquelle l’organisme fonctionne en état de moindre résistance à tous les niveaux.
La nuit européeenne
Eurostat précise que « le travail en soirée ou de nuit est un concept difficile à établir sur une base strictement uniforme pour tous les États membres puisque les définitions de la soirée et de la nuit diffèrent largement ». Le travail du soir est néanmoins en général défini comme celui effectué après les heures de travail normales mais en dehors des heures habituellement dévolues au sommeil tandis que le travail de nuit est effectué pendant les heures habituelles de sommeil et implique par conséquent des horaires de sommeil “anormaux” pour les personnes concernées.
Renforcer les études des conséquences sur la santé
La Dares indique que les capacités de résistance sont physiologiquement réduites la nuit, et les effets négatifs du travail de nuit sur la santé à long terme tendent à se cumuler avec d’autres facteurs de risques.
Plus le nombre de personnes travaillant la nuit augmente, plus les programmes de recherche et d'études devraient se renforcer. Elles sont encore insuffisamment conduites.
Si le travail de nuit est visible et mesurable, ses conséquences à long terme sur la santé des salariés le sont beaucoup moins. Une étude portant sur les personnes de 50-59 ans ayant travaillé au moins 10 ans a été réalisée à partir de l’enquête Santé et itinéraire professionnel conduite en 2007 par la Drees et la Dares. Sur le champ de cette étude, 4 % des femmes et 14 % des hommes ont été exposés pendant au moins quinze ans au travail de nuit. Ces personnes exposées au travail de nuit sont 24 % à se dire limitées dans leurs activités quotidiennes, contre 19 % de l’ensemble des personnes dans le champ de l’étude. À caractéristiques sociodémographiques équivalentes, une exposition de quinze ans ou plus au travail de nuit accroît la probabilité d’être limité dans les activités quotidiennes de presque 50 %.
Une majorité d’études épidémiologiques se situent plutôt en faveur d’un lien entre travail de nuit et cancer, notamment du sein. Le centre international de recherche sur le cancer (Circ) a pour sa part classé le travail posté de nuit comme cancérogène probable pour l’homme sur la base, d’une part, de résultats montrant l’apparition de tumeurs chez les animaux aux rythmes circadiens perturbés, d’autre part, d’études menées sur les infirmières et les hôtesses de l’air et qui montrent une augmentation du risque de cancer du sein chez les femmes travaillant la nuit.